Grotte Mandrin-2016

2 septembre 2016
Les mécènes visitent et protègent
ce site préhistorique, fouillé depuis un quart de siècle

Début septembre, la municipalité a reçu une douzaine de responsables d’entreprises et associations locales, malatavernoises pour la plupart. Cette rencontre a permis de leur faire découvrir le site archéologique de la Grotte Mandrin, pour lequel ils se sont investis cette année en qualité de mécènes. Ils ont été accueillis sur place par l’archéologue en charge des seules fouilles programmées de la Drôme depuis 5 ans, Ludovic SLIMAK [1], pour une visite commentée et la présentation des actions réalisées, en cours, et en projet.


La Grotte Mandrin, une référence

La Grotte Mandrin fait l’objet de fouilles programmées depuis 26 ans, dirigées par le CNRS qui pilote une équipe scientifique de 32 chercheurs internationaux. Ce site compte parmi les 10 plus importants à l’échelle de l’Europe pour les recherches portant sur les derniers Néandertaliens, qui se sont progressivement éteints à l’arrivée sur le continent de nos ancêtres biologiques (Homo sapiens). Douze installations humaines ont été recensées et enregistrent les passages réguliers de chasseurs néandertaliens durant 80 millénaires, jusqu’à leur extinction subite il y a environ 42 000 ans.

La stratigraphie originale et complète de l’abri, sur au moins 120 000 ans ; la quantité, la diversité et la très bonne préservation du matériel archéologique (restes humains, industrie lithique et osseuse, élément d’art pariétal, foyers, vaste structure circulaire liée à un aménagement domestique de l’espace…) permettent de jeter un regard neuf et inédit sur une époque charnière du paléolithique, à la croisée de Néandertal et d’Homo Sapiens.

En savoir + : la Grotte Mandrin sur le site internet de Malataverne.


Une urgence : protéger

En 2013, l’espace de recherche s’est étendu hors de l’excavation naturelle actuelle, grâce à l’installation d’un auvent et d’une clôture qui a permis de mieux sécuriser le site. Ce prolongement correspond sans doute au porche “d’origine”, effondré au fil des millénaires. Il offre désormais la possibilité d’appréhender tout l’espace occupé par les hommes, à chacun de leur passage.
Mais ce dispositif n’a hélas pas été suffisant, puisque l’abri a été pillé et vandalisé à trois reprises au cours de l’hiver 2014-2015. la gendarmerie a depuis classé la Grotte Mandrin « site sensible » et sa protection est devenue une priorité de ses services. Sur la base des préconisations émises par l’Adjudant-chef AUGUSTE, référent sûreté, il a été décidé d’installer un dispositif de vidéosurveillance.

Ce projet, piloté par la commune, constitue cependant un investissement tel qu’elle ne pouvait en assumer seule le financement. De son côté, la DRAC Rhône-Alpes-Auvergne [2] est le pilote administratif des fouilles, et donc le partenaire financier naturel de ce programme. Or, sa contribution restait insuffisante pour boucler le budget nécessaire (10 000 € sur environ 37 000 € ht). L’appel à d’autres financements, privés cette fois, est rapidement apparu nécessaire.
Grâce au mécénat d’entreprises locales, 21 400 € ont été réunis et la protection du site a pu être renforcée. La collectivité et l’équipe scientifique adressent leurs vifs remerciements aux responsables des entreprises : Novarc, Lagarde, Coved, VPI, Berthouly, Valette TP, Valrim, Rampa, D. Cottarel, CD Métrés, Bieron.
A l’occasion de cette visite du 2 septembre 2016, L. slimak revient sur la nécessité d’une videosurveillance, au micro de Radio France Bleue Drôme-Ardèche :


Bénévoles et huile de coude,
mobilisés pour récupérer l’eau de pluie

En parallèle de cette action d’urgence, l’Association Spéléologique Privardoise et le club des Archers castelneuvois ont été mis à contribution cet été. L’objectif : installer un système de récupération des eaux de pluie, drainées par le auvent, afin de permettre le tamisage à l’eau du matériel archéologique prélevé. L’équipe ayant son laboratoire à plusieurs kilomètres, cette aide logistique sur site constitue un confort considérable. Elle permet d’accélérer le rythme des fouilles en améliorant sur place le tri des sédiments, fortement noircis par les foyers anciens.

Dans le détail, les spéléologues du club privardois, emmenés par leur président Jérôme Loire, ont procédé à la pose du matériel pris en charge par la commune (chéneaux, gouttières et raccordements) à l’occasion d’un exercice de « haute voltige ». Quant aux bénévoles des Archers castelneuvois, ils étaient guidés par leur président Claude Etienne [3] afin de monter à dos d’homme et flanc de montagne, les trois cuves offertes par l’entreprise locale la Bulle Verte, nécessaires à la récupération des eaux de pluie.


Projet 2017 : une monographie et un livret grand public

Après 26 ans de recherches, une synthèse des résultats doit légitimement paraître et permettre le partage des nouveaux savoirs acquis. Dans cette perspective, une monographie sur la Grotte Mandrin est déjà prête à être éditée, sous la direction de L. Slimak [4] Ce beau volume de plus de 500 pages pourrait voir le jour fin 2017, si les financements nécessaires étaient rassemblés. Il pourrait alors être accompagné d’un livret documentaire conçu par et pour la commune, en collaboration avec L. Slimak et l’éditeur.
Alors que la monographie est un bel ouvrage de portée scientifique et de grande qualité esthétique, destinée à un public de professionnels et d’amateurs éclairés, le fascicule d’accompagnement se voudra plus pédagogique et tous publics. Il permettra une diffusion plus large et accessible des premières contributions de la Grotte Mandrin à la réécriture de notre Préhistoire. Ce projet de livret marque en cela la volonté municipale de favoriser la prise de conscience et l’appropriation par la population, jeune et adulte, de son riche patrimoine local.


Notes

[1] Ludovic Slimak est chargé de recherche au CNRS, et basé à l’Université de Toulouse le Mirail

[2] La Direction Régionale des Affaires Culturelles représente l’Etat localement. Les directions de Rhône-Alpes et Auvergne viennent de fusionner, comme les Régions.

[3] Claude Etienne est également conseiller municipal de Malataverne, et fils de Gaston Etienne, inventeur du site.

[4] (avec Y.Giraud, P. Yvorra, L. Metz) : “Des derniers néandertaliens aux premiers hommes modernes en France méditerranéenne. Les données de la Grotte Mandrin à Malataverne”.